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Comment rendre un traitement de l'obésité durable ?

Zur Rose Informations 14 avril 2024

Dr. Egermann

Dr. med. Ulrich Egermann, membre du réseau dédié à l’obésité de Winterthour. Il travaille depuis une quinzaine d’années comme spécialiste de l’obésité.

«Je suis toujours étonné des différents motifs qui poussent une personne à perdre du poids et à modifier son mode de vie. C’est pourquoi j’ai toujours beaucoup de plaisir à accompagner mes patientes et mes patients sur la voie d’une vie plus saine.»

L’obésité est une maladie chronique qui nécessite des mesures individuelles, de la patience et les compétences professionnelles d’une équipe thérapeutique interdisciplinaire. Dans cet entretien, le Dr Ulrich Egermann, spécialiste de l’obésité, explique quels types de traitement sont pertinents et à quel moment, pourquoi le traitement par injection améliore la prise en charge et ce que les personnes concernées peuvent faire au quotidien pour se sentir mieux dans leur corps.

 

Dr Egermann, à qui peut s’adresser une personne qui souhaite obtenir de l’aide en raison d’une obésité ou d’une forte surcharge pondérale?

Tout d’abord, la personne devrait elle-même essayer de perdre du poids en changeant ses habitudes, en faisant davantage d’exercice physique et en adoptant une alimentation plus saine, et ce, pendant six mois ou un an environ. Si elle constate qu’elle a atteint ses limites, développe des problèmes de santé ou ne peut pas à mener l’existence qu’elle souhaite, c’est le moment de consulter. Je lui conseille de commencer par s’entretenir avec son médecin de famille, qui pourra alors démarrer la prise en charge ou l’orienter vers un centre spécialisé dans le traitement de l’obésité.
 

Une personne peut-elle aussi consulter parce qu’elle ne sait tout simplement pas comment mener une vie plus saine?

Si une personne souhaite se faire aider, cela signifie qu’elle a compris qu’elle ne pouvait plus s’en sortir seule. Et c’est déjà un premier pas.

La plupart du temps, il y a un moment clé qui pousse à l’action La personne regarde par exemple de vieilles photos de vacances de l’année dernière et constate qu’elle n’a plus jamais mis le pantalon qu’elle portait sur la photo parce qu’il est devenu beaucoup trop petit. Elle comprend alors que quelque chose ne va pas. Souvent, les proches exercent également une pression sur la personne pour qu’elle entreprenne quelque chose. Je pense toutefois qu’il est important que les personnes concernées viennent me voir de leur propre initiative, parce qu’elles sont motivées et non pour faire plaisir à quelqu’un, parce qu’une influenceuse quelconque sur TikTok célèbre la minceur ou parce qu’une célébrité se vante d’avoir utilisé la méthode soi-disant simple de l’injection. Je n’aime pas entendre ça. Dans ce cas, je dirais à cette personne qu’elle s’est trompée d’adresse.

Quelles sont les attentes des personnes obèses qui consultent?

J’ai la chance que les personnes concernées qui me viennent le font de leur plein gré. Elles savent qu’elles ne peuvent pas continuer comme avant. Je peux donc commencer précisément par ce qui les gêne concrètement. En effet, ce qui est perçu comme gênant est très variable. Certaines personnes ne sont pas tant préoccupées par leur poids, que par les répercussions sur leur santé. Certaines jeunes femmes, par exemple, ne parviennent pas à tomber enceintes. Par exemple, une patiente vient de m’écrire qu’elle avait eu des jumeaux. Elle était venue me voir auparavant parce que sa fertilité était réduite en raison de son obésité. Pour elle, le bénéfice pour sa santé est là – indépendamment du nombre de kilos perdus – car elle a contribué à sa fertilité en perdant du poids. J’ai trouvé cela remarquable. Pour les personnes concernées, il ne s’agit pas du chiffre sur la balance, mais de la possibilité d’organiser leur vie personnelle, familiale, professionnelle ainsi que leurs loisirs comme elles le souhaitent.


"Il ne s’agit pas du nombre sur la balance, mais de permettre aux personnes concernées d’organiser leur
vie personnelle, familiale et professionnelle ainsi que leurs loisirs comme elles le souhaitent."

Le poids corporel et le degré d’obésité sont-ils des facteurs décisifs dans le choix du type de traitement approprié?

Le nombre sur la balance n’est pas d’une grande utilité en soi lorsqu’il s’agit de choisir le traitement le plus approprié. L’indice de masse corporelle et le degré d’obésité ne me permettent pas à eux seuls de définir les mesures médicales qui permettront d’atteindre le but recherché. C’est pourquoi je renonce initialement à demander à mes patientes et à mes patients de monter sur la balance.

Qu’est-ce qu’il est préférable de faire selon vous?

Au début, je préfère mesurer le tour de taille. En effet, si une personne a surtout de la graisse abdominale, cela est dangereux, car son risque de maladies cardiovasculaires est nettement plus élevé. J’aborde donc le traitement de manière très différente que s’il s’agit d’une personne présentant du tissu adipeux périphérique avec des jambes épaisses ou un lipoedème. Bien sûr, ce type de problème peut être gênant visuellement et affecter négativement l’estime de soi, mais ce n’est pas aussi risqué que la graisse abdominale. En mesurant le tour de taille, je définis ainsi le risque médical.

Graisse Viscerale

Le risque médical a donc plus d’importance que la souffrance psychologique d’une personne?

Une patiente ou un patient peut également souffrir beaucoup sans avoir de maladies concomitantes ou un risque élevé d’effets négatifs sur sa santé. La souffrance psychologique est entièrement subjective. Mon objectif au plan thérapeutique est donc avant tout de réduire les problèmes médicaux associés à l’obésité et leurs répercussions sur la santé de la personne.
 

"La sévérité des maladies concomitantes associées à l’obésité détermine la méthode de traitement."
 

Quel rôle joue la sévérité de la maladie dans la décision thérapeutique?

La détermination de la sévérité de la maladie est importante pour développer un plan de traitement individuel adapté aux besoins et aux risques de la personne concernée. Par exemple, si vous souffrez déjà de maladies concomitantes telles que l’apnée du sommeil, l’hypertension ou le diabète de type 2, la perte de poids devient une nécessité. Il y a aussi des personnes qui présentent une masse importante de tissu adipeux, mais n’ont développé aucune maladie physique tout au long des années de suivi médical. Ces personnes ne sont pas obligées de perdre du poids, sauf si elles souffrent de la pression sociale. Il s’agit plutôt de mettre en évidence les maladies secondaires à ce surpoids et pour lesquelles il existe un risque accru. Même les personnes obèses en bonne santé physique ont donc tout intérêt à perdre du poids.

La sévérité de la maladie détermine-t-elle également l’ampleur et le rythme de la perte de poids?

En matière de perte de poids, il s’agit avant tout de réduire le risque de dommages pour la santé ou d’atténuer les maladies secondaires existantes. L’ampleur de la perte de poids dépend donc naturellement aussi de la sévérité de la maladie. Pour soulager les articulations, il est judicieux de perdre environ 5% du poids initial. En cas de diabète de type 2 ou de maladies métaboliques ou hormonales, une perte de poids d’environ 10% devrait être visée, et en cas d’apnée du sommeil et de maladies psychiques associées à des troubles de l’image corporelle, la perte de poids devrait être de 15 à 20%. Quelle que soit la sévérité, la perte de poids ne devrait généralement pas être radicale, mais progressive et constante. Autrement dit, elle doit s’étendre sur un an à un an et demi environ.
 

Quelle perte de poids moyenne peut-on espérer avec les différents traitements médicaux?

Un traitement oral en comprimés permet d’obtenir une perte de poids maximale de 10%. Cependant, le poids ne peut souvent pas être maintenu à un niveau inférieur très longtemps. Avec les anciens traitements par injection, une réduction d’environ 7 à 10% était réaliste. Avec les nouveaux traitements par injection, cette valeur moyenne a doublé pour atteindre environ 15 à 20%. La gastrectomie longitudinale permet d’obtenir une réduction du poids initial d’environ 25%, et le pontage gastrique d’environ 30 à 35%.
 

Si une perte de poids de 30% est nécessaire pour des raisons médicales, une modification du mode de vie et un traitement médicamenteux ne suffisent donc pas?

Dès le premier entretien avec mes patientes et mes patients, je détermine le point de départ et l’objectif des mesures thérapeutiques. Si, par exemple, je pouvais faire passer le poids d’une personne souffrant d’obésité sévère de 170 à 140 kg grâce au traitement par injection, il y aurait toujours un risque élevé de dommages pour la santé malgré la perte de 30 kg, en raison de la forte surcharge pondérale restante. Dans ce cas, des modifications du comportement et un traitement médicamenteux ne suffisent pas. Il faut donc être franc et honnête et parler d’une opération, en tenant compte bien sûr des résultats des analyses de laboratoire et d’autres paramètres. Néanmoins, une modification des habitudes et des mesures personnalisées sont également nécessaires pour un mode de vie plus sain.

Dans quelle mesure les traitements médicamenteux et chirurgicaux sont-ils durables?

Qu’il s’agisse de comprimés, d’injections ou d’opérations, tous les types de traitement présentent toujours un risque de reprise de poids après une période de stabilité pondérale, dès que les habitudes alimentaires initiales réapparaissent, car elles n’ont pas été modifiées. L’ampleur de la nouvelle prise de poids est toutefois plus lente et moins prononcée chez les personnes opérées que chez les personnes traitées par des médicaments.

"Les modifications du comportement doivent commencer immédiatement, même si elles sont minimes."
 

Des modifications du mode de vie sont donc absolument nécessaires, quel que soit le type de traitement?

Les mesures de soutien jouent un rôle central dans tous les types de traitement. Quel que soit le type de traitement choisi, les modifications du comportement, telles que l’augmentation de l’activité physique quotidienne et une alimentation plus saine, doivent commencer immédiatement, même si elles ont minimes.
 

Qu’est-ce qui est le plus difficile pour vos patientes et vos patients lors de la perte de poids?

Nombre d’entre eux parviennent très bien à perdre du poids une ou deux fois avec certaines modifications du mode de vie,et puis, soudain, la situation de vie change par exemple. Les conditions de vie étant nettement différentes, ces personnes abandonnent leurs nouvelles habitudes et retombent dans le cercle vicieux des fringales et de la mauvaise conscience. Dans ce cas, je réfléchis avec la personne concernée à la manière dont elle peut recréer un cercle vertueux, sans culpabiliser. C’est parfois très difficile.

Paar in der Natur
 

Vous trouverez des informations sur les causes, les degrés et les traitements possibles de l’obésité ainsi que des conseils concrets pour un quotidien plus sain sur notre page de compétences dédiée à l’obésité.

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Peut-on apprendre à réduire les fringales sans médicaments?

Dès le début du traitement, j’essaie de distinguer avec mes patientes et mes patients s’il s’agit d’une véritable faim, d’une habitude ou d’une «fringale», c’est-à-dire d’une envie irrépressible de nourriture. La personne mange-t-elle parce qu’elle a l’estomac vide ou parce que cela lui procure une satisfaction? En outre, il est souvent socialement souhaitable dans un cadre convivial de manger avec toute le monde même si on ne le souhaite pas. Mon objectif est d’enseigner à chaque personne une stratégie qui lui permette de vraiment maîtriser ces sentiments dont elle est quasiment à la merci. La stratégie efficace varie considérablement d’un individu à l’autre. Il y a, par exemple, les personnes pour lesquelles un accompagnement psychologique est très bénéfique, tandis que d’autres font de grands progrès avec l’hypnose. Tout cela va dans le bon sens. À chacun et chacune sa méthode!

Pourquoi est-il si important d’adopter des stratégies et de fixer des objectifs individuels dans le traitement de l’obésité?

Il n’y a pas une seule et unique cause de l’obésité ni une seule et unique solution. Il faut prendre au sérieux l’obésité en tant que maladie, et la personne qui en souffre ainsi que ses défis personnels. Il s’agit de les évaluer au cas par cas et de voir comment il est possible d’y apporter une réponse thérapeutique.
 

"Les traitements médicamenteux ou chirurgicaux de l’obésité ne fonctionnent que s’ils sont associés à un mode de vie plus sain."
 

Comment décidez-vous quel traitement est le plus efficace?

En médecine, nous nous basons sur les valeurs cibles. Il est tout à fait possible de maîtriser les problèmes d’articulation en perdant 10% de poids sans mesures médicales, par exemple par une physiothérapie et une thérapie comportementale ou une formation à la pleine conscience. Il ne faut pas en sous-estimer les effets. En revanche, si un patient doit perdre 30 à 35% de son poids en raison de maladies concomitantes graves, il n’y a pas d’autre solution que l’opération. Le traitement par injection avec des analogues du GLP1 comble l’écart thérapeutique entre ces deux pôles. Il s’agit d’une option thérapeutique pour une indication de perte de poids d’environ 15 à 20%. Il n’y a pas eu de progrès dans ce domaine pendant des années. Les analogues du GLP1 ont ouvert de nouvelles possibilités en la matière.

Quels sont les effets des médicaments GLP-1 dans le corps humain ?

Notre intestin sécrète l’hormone GLP1 immédiatement après un repas. Les médicaments, appelés analogues du GLP1, imitent cette hormone endogène et agissent de la même manière dans différentes parties du corps: ils incitent les cellules bêta du pancréas à libérer de l’insuline et inhibent en même temps le glucagon, hormone antagoniste de l’insuline. Cela fait baisser la glycémie et réduit les fringales. Le blocage des récepteurs responsables de la perception de la faim et de la satiété entraîne également une diminution de la sensation de faim et de l’envie de nourriture. Le ralentissement de la vidange gastro-intestinale permet à son tour de rester rassasié plus longtemps. Un analogue du GLP1 est donc un analogue hormonal qui se lie à différents récepteurs dans différentes régions du corps et y provoque diverses réactions physiologiques.

Effet des médicaments GLP1

Quel est l’effet principal du traitement par injection?

Le traitement par injection est un traitement médicamenteux qui aide les personnes obèses à modifier leur comportement à long terme et à améliorer leur fonctionnement hormonal. Les patientes et les patients me disent souvent que leurs pensées obsessionnelles autour de la nourriture s’arrêtent subitement, dès la première injection et sans modification du poids, des valeurs biologiques ou des habitudes. Les personnes ressentent une satiété nettement accrue, qu’il n’est plus aussi facile d’ignorer ou de rompre. Je trouve cela fascinant. Il existe maintenant un médicament qui stimule la prise de conscience du corps et des signaux qu’il envoie, de sorte que les personnes concernées parviennent réellement à briser le cercle vicieux.
 

Donc, si ces pensées obsessionnelles autour de la nourriture disparaissent, est-il vraiment possible de modifier son comportement?

Le traitement par injection n’est que le moyen d’atteindre un but, dans la mesure où son mécanisme d’action permet de ne pas avoir constamment en tête l l’assouvissement d’un désir de nourriture ou de la prochaine envie de sucre. Tout d’un coup, il ne s’agit plus seulement de lutter contre les fringales. De nombreuses personnes concernées me disent qu’elles se sont senties libérées pour la première fois de ce cercle vicieux et qu’elles ont ressenti un grand soulagement. Grâce à ce mécanisme d’action, les personnes obèses ont la possibilité de réfléchir sérieusement à leur mode de vie, à leur activité physique et à leur comportement alimentaire. Elles peuvent maintenant se demander quelles autres alternatives existent pour gérer leurs émotions. Par exemple, au lieu d’acheter des chips sous l’effet de la frustration ou en réaction à une déception, elles peuvent par exemple se préparer un thé, faire du bricolage ou sortir prendre l’air. Pendant le traitement, les personnes concernées peuvent expérimenter et adopter de nouvelles habitudes et conserver bien souvent ce nouveau mode de vie par la suite, après la fin du traitement médicamenteux. Dans la mesure où il suscite une véritable réflexion sur son propre comportement, le traitement par injection est particulièrement adapté pour apporter un changement durable.

Gila-Krustenechse

Le venin de lézard pour lutter contre l’obésité

Les analogues du GLP1 trouvent leur origine dans le désert du Nouveau-Mexique: le monstre de Gila en Amérique du Nord ne mange certes qu’une seule fois par an, mais en grande quantité. En raison de la surcharge en sucre et de la sécrétion massive d’insuline qui en résulte, il devrait en principe mourir. Cependant, une découverte fortuite a permis d’élucider le mystère: le venin du monstre de Gila contient une substance, l’exendine-4, qui agit comme l’hormone intestinale GLP-1, ce qui permet au lézard de survivre à son festin annuel. C’est à partir de cette découverte qu’ont été développés les analogues du GLP1 utilisés aujourd’hui dans le traitement de l’obésité et du diabète de type 2.

À quelles personnes le traitement par injection convient-il?

Tout d’abord, ce sont les caisses-maladie qui définissent les seuils de prise en charge des coûts du traitement: à partir d’un IMC de 30 ou de 27 associé à une maladie concomitante existante.

Pour en savoir plus sur les conditions de prise en charge des caisses-maladie, cliquez ici

L’injection n’est donc clairement pas un produit «lifestyle» qui permet de perdre des kilos sans effort, comme les médias le décrivent souvent à tort. Il s’agit d’un traitement médicamenteux pour les personnes obèses et ayant une forte surcharge pondérale qui présentent un risque élevé de problèmes de
santé ou des maladies concomitantes ou secondaires existantes.

BMI Tabelle

L’idée véhiculée dans les médias selon laquelle il est possible de se débarrasser de quelques kilos en trop grâce à au traitement par injection est donc fausse?

Les personnes qui ne souhaitent perdre que quelques kilos ne constituent clairement pas le groupe cible de ce traitement médicamenteux. Pour celles-ci, des exercices réguliers d’endurance et de musculation, une alimentation saine et, le cas échéant, un soutien psychologique sont dans la plupart des cas la meilleure solution. Le concept de piqûre miracle qui circule dans les médias me dérange, car ce n’est pas du tout l’idée. L’obésité est une maladie chronique avec des risques pour la santé clairement définis; ce n’est pas un défaut cosmétique. Je n’aime guère l’idée d’imposer une perte de poids à l’aide d’un traitement médicamenteux de courte durée à forte dose sans changer quoi que ce soit dans le mode de vie. Je ne peux pas non plus défendre cela d’un point de vue éthique et moral.
 

"Il faut être prêt à écouter les signaux envoyés par le corps."
 

Quel état d’esprit doit-on avoir pour ce type de traitement?

Pour moi, le plus problématique, ce sont les personnes qui remplissent les critères pour bénéficier d’un traitement par injection et qui, de ce fait, ont le sentiment de ne pas avoir à se poser de questions. Cela ne fonctionne pas et ce n’est pas du tout l’intérêt de ce traitement.
À l’inverse, le candidat idéal est celui qui est prêt à vraiment écouter les signaux que lui envoie son corps. C’est aussi une personne qui ne veut pas céder pas à la pression sociale, par exemple, à l’occasion d’une grande fête de famille ou un repas d’association, lorsqu’on lui dit qu’elle ne va tout de même pas s’y mettre maintenant et qu’elle peut bien faire une exception. Quand une tablée de dix personnes vous incite à vous resservir, il faut un certain courage pour refuser en disant que vous souhaitez changer et que c’est pour cela que vous prenez un traitement médicamenteux.
Il faut donc avoir la volonté de s’attaquer à cette question, de s’en à certaines règles et de les communiquer ouvertement autour de soi. C’est pour moi une condition idéale à la réussite du traitement, car cela force à la réflexion. La personne doit comprendre que ce n’est pas bon pour elle et pour sa santé si elle continue comme avant.

La perte de poids est-elle constante tout au long du traitement ou évolue-t-elle au fil du temps?

Avec le temps, on observe une certaine accoutumance au niveau des récepteurs. En règle générale, aucune perte de poids significative supplémentaire ne peut être imposée après neuf à douze mois. Pendant cette phase, il s’agit en premier lieu de consolider les nouvelles habitudes prises au quotidien. En effet, ce n’est que si les personnes concernées adoptent un comportement plus sain sur le long terme qu’elles pourront maintenir leur poids même après la fin du traitement médicamenteux.
 

Des changements de comportement clairs sont donc nécessaires pour que le traitement soit efficace à long terme?

Si vous ne parvenez pas à changer vos habitudes et à les ancrer dans votre quotidien pendant la durée du traitement, vous prendrez à nouveau du poids à la fin du traitement par injection. En l’absence de changement de comportement durable, la maladie chronique qu’est l’obésité réapparaît après l’arrêt du traitement médicamenteux et pose à nouveau des problèmes. C’est d’ailleurs le cas non seulement pour le traitement par injection, mais aussi pour tout autre type de traitement médical. Il faut que les personnes concernées aient la volonté de se prendre en charge et de ne pas se contenter de médicaments ou d’interventions chirurgicales.

Existe-t-il un consensus scientifique sur la durée du traitement par injection?

En règle générale, le traitement par des analogues du GLP1 dure trois ans. Mais toutes les personnes concernées n’ont pas besoin de suivre le traitement aussi longtemps; certaines ont besoin d’un traitement médicamenteux plus court. Dans l’idéal, l’inhibition temporaire du désir compulsif de nourriture induite par le médicament a pour conséquence une modification durable du comportement jusqu’à la fin du traitement de sorte que les personnes concernées peuvent maintenir leur nouveau poids et leur mode de vie plus sain sans avoir recours aux médicaments.
 

Est-il judicieux, dans certains cas, de prolonger ces trois ans?

D’un point de vue moléculaire et biochimique, le principe actif peut être utilisé pendant une durée quasi illimitée. Aucune dépendance spécifique ni aucun effet néfaste à long terme n’ont été identifiés à ce jour. C’est pourquoi les médicaments de cette classe pharmaceutique sont volontiers utilisés pour le traitement du diabète de type 2. On pourrait certes prolonger le traitement de trois ans, généralement à ses propres frais. Cependant, je conseille de faire d’abord une pause pour voir comment ça se passe sans traitement médicamenteux. On pourrait alors tester de nouvelles méthodes pendant un ou deux mois, comme le jeûne intermittent ou l’alimentation en pleine conscience, et il est tout à fait possible d’y associer un traitement mdicamenteux à faible dose en comprimés, afin d’en renforcer l’effet.

Quels effets secondaires peuvent survenir lors du traitement par injection?

On se rend compte que quelque chose est différent par rapport d’habitude. En raison du ralentissement de la vidange gastro-intestinale, il faut s’attendre à une sensation de ballonnements dans le ventre et donc à des nausées. De nombreuses patientes affirment que la sensation est similaire à celle d’une grossesse: une pression constante, toujours quelques nausées, mais heureusement jamais de vomissements importants. Une diarrhée , des maux d’estomac et des douleurs abdominales sont également possibles. À long terme, une constipation peut tout à fait apparaître. Ces symptômes s’atténuent généralement au bout de quelques semaines.

Certaines personnes, généralement des femmes, développent des maux de tête et une sensation gênante de tiraillements dans la tête. Cet effet indésirable dépend de la dose, mais persiste relativement longtemps chez certaines patientes. Dans ce cas, il convient de réduire la dose ou d’interrompre le traitement pendant environ deux semaines. Cette interruption ne change rien au concept de base du traitement. Mais cela permet de voir si la douleur est vraiment due à un effet secondaire du médicament ou peut-être à une autre maladie comme une inflammation du nez et des sinus.

En raison de la perte de poids relativement importante au début, une perte de cheveux peut survenir. Celle-ci est due à une irritation des follicules pileux, déclenchée par la libération des substances nocives stockées dans le tissu adipeux. En règle générale, il ne s’agit toutefois que d’un problème temporaire. La chute des cheveux cesse au bout de quatre à six mois, et les cheveux repoussent. La perte de cheveux est toutefois beaucoup plus prononcée chez les personnes ayant subi un pontage gastrique.

Les réactions cutanées au site d’injection, les calculs biliaires, le syndrome d’épuisement (fatigue), les vertiges et les troubles du goût sont plus rares. Les effets indésirables potentiellement fatals, tels qu’une inflammation du pancréas (pancréatite), sont très rares. Cela concerne surtout les personnes ayant des antécédents de problèmes au foie ou au pancréas, par exemple à cause de l’alcool. Toutefois, même si le pancréas est en parfaite santé, le médicament peut provoquer une irritation. En cas de douleurs abdominales inexpliquées, il faut toujours réagir. Dans ce cas, il convient de faire une pause thérapeutique. Souvent, une hospitalisation pour observation est également utile afin de voir si une irritation du pancréas ou d’autres causes telles que des calculs biliaires sont à l’origine des douleurs.

Pourquoi ces effets secondaires surviennent-ils?

Une grande partie des effets secondaires s’explique par la distribution des récepteurs impliqués dans le mécanisme d’action. Il s’agit donc à la fois d’effets et d’effets secondaires.
 

"Il n’existe pas de voie qui mène directement au poids idéal."
 

Peut-on apaiser les sensations de ballonnements et les nausées?

En adaptant son comportement, il est possible de réduire les effets secondaires afin de pouvoir vivre avec. Tout ce qui est bon pour la digestion atténue ces troubles: adapter la taille des portions, bien répartir les repas tout au long de la journée, augmenter la quantité de boissons, maintenir une activité physique. On peut essayer aussi de consommer des aliments fermentés, qui sont très bons pour la flore gastro-intestinale et peuvent régulariser le transit. Il s’agit, bien sûr, d’un changement qui peut demander beaucoup d’efforts, mais cela en vaut la peine.

Avez-vous un message clé pour les personnes concernées qui s’engagent sur cette voie pas toujours linéaire?

La clé est d’accepter de prendre des détours. Quel que soit le type de traitement que vous choisissez, aucune voie ne mène directement au poids idéal. On avance souvent pas à pas, et on rencontre beaucoup de carrefours où l’on doit prendre une décision pour la suite. Des questions telles que «Qu’est-ce que je fais de ma vie?», «Que puis-je changer moi-même?», «Qu’est-ce que je ne peux peut-être pas contrôler?», «Comment est-ce que j’y fais face?» reviennent régulièrement.

Il s’agit de s’ouvrir à la nouveauté, de changer sa perception. Un comportement alimentaire plus sain, une nouvelle sensation de satiété, une perception différente de son corps grâce à une augmentation de l’activité physique et à la pleine conscience: c’est là qu’il faut oser expérimenter. Je suis particulièrement heureux quand quelqu’un me raconte avoir commencé une thérapie par la peinture, s’être lancé dans la poterie ou avoir rejoint un club de randonnée. Il est important de se percevoir comme une personne qui a le pouvoir d’agir et de façonner sa vie comme elle l’entend. Il s’agit d’emprunter ce chemin plein de détours et de se faire aider: je ne cesse d'encourager mes patientes et des patients dans ce sens.

Questions fréquentes concernant les prescriptions des caisses-maladie pour les analogues du GLP1